mercredi 14 septembre 2011

★LeS DéChiRéS De La ViE…★


Dans les enfants, il y a les vrais déchirés de la vie et les footballeurs acteurs: les acteurs arrêtent de pleurer dès que les parents sont partis, et ils sont heureusement majoritaires. Mais chaque classe possède au moins un déchiré de la vie, c’est le quota.
J’n'ai pas eu de bol, cette année: c’était « promo », et parmi mes 29 élèves de deux et trois ans, j’ai chopé trois déchirés…


Tous les déchirés de la vie n’ont pas le même comportement, ce serait trop facile.


Le premier, appelons le Primo, est un déchiré de la vie discret: il pleure, mais pas trop fort, de 8h30 à 16h30, et ça produit genre un bourdonnement continu dans la classe. J’ai eu l’impression l’autre jour que ça s’arrêtait dans la cour, mais non, c’est juste que ça résonnait moins. Au bout d’une heure, on s’y habitue, c’est comme d’habiter au dessus du métro ou près d’un aéroport, on ne se rend plus trop compte. Ce qui est sympa de sa part, c’est qu’il est tranquille: il ne se sauve pas et sait rester assis en pleurant à sa place, il est maniable, on peut le faire aller du banc à une chaise, d’une chaise à la cour, de la cour aux toilettes. Bon, c’est comme une plante, de temps en temps, il faut s’en occuper un peu histoire de, quoi. Mais on sait bien qu’en lui proposant de faire de la peinture, du sport, de la pâte à modeler ou des cubes, on n’aura jamais d’enthousiasme venant de sa part. Le petit Primo, mi décembre, en aura certainement assez de ne rien faire et finira par comprendre que ses gémissements saoulent et que l’école, c’est le kiff. En attendant, la classe doit supporter.


Primo, c’est quand même plus du gâteau que Deuzio. Deuzio, c’est la ventouse: on se déplace, il se déplace avec, aimanté. S’il était juste un peu pot de colle, ça passerait. Mais il a aussi besoin d’être rassuré environ toutes les trois secondes dix, et c’est pour ça qu’il pose sans arrêt la même question: « mama aléou? » (traduction: elle est où, ma reum?), à laquelle il faut aussi sans arrêt répondre (« elle va bientôt arriver ») avant que Deuzio ne se transforme en Primo. J’me donne des challenges de dingue, j’essaie de répondre à chaque fois différemment. J’me dis qu’il y a peut être une fois où il y aura un déclic, où Deuzio va faire aller ma phrase de ses oreilles à son cerveau. Bon ben pour l’instant, ça ne fonctionne pas hein.
Deuzio n’a pas l’air super gênant en soi, et à 8h40, j’en rigole encore avec l’atsem (l’atsem, c’est la dame en or qui est là pour s’occuper des petits avec moi). C’est au bout de la 584299ème fois qu’il pose la question que je commence à perdre patience, et heureusement que l’école finit à 16h30, parce que j’imagine qu’à 18h j’aurais très envie de hurler: « TU ME SAOULES AVEC TA MERE, J’AI PRESQUE ENVIE DE DIRE QU’ELLE NE REVIENDRA PAS. JAMAIS« .
‘Faut aussi dire que le plus pénible, c’est que Deuzio pose toujours la question à des moments inopportuns, et c’est gênant de dire « oui, bientôt, maman va arriver » quand je suis en pleine lecture de petit ours brun qui va au supermarché ou en pleine souris verte.

Attention: le prochain paragraphe comporte des choses pas terribles à lire si vous êtes en train de manger, vous aurez été prévenus.

Mais bon, je préfère les questions de Deuzio aux vomitos de Troizio. Troizio galère tellement à quitter sa mère (qui pleure aussi de s’en séparer) qu’à force de hurler, elle fait des petits lapins (traduction: elle vomit).
La première fois, je n’étais pas au courant, on n’m'avait pas prévenue, je l’ai gardée un peu dans mes bras pour la calmer. Puis je l’ai un peu lâchée pour qu’elle aille dans les bras de l’atsem. Puis je l’ai reprise, puis l’atsem l’a reprise.
Comme rien n’y faisait, l’atsem est partie un peu avec elle à côté histoire de lui changer les idées et de la faire arrêter de traumatiser tous les autres enfants de la classe (les enfants, c’est parfois comme des dominos: suffit d’un qui pleure, et pof pof pof, réaction en chaîne !).
L’atsem est revenue trois secondes après pour me dire qu’elle avait retapissé le couloir, et sur le coup ça m’a fait un peu rigoler parce qu’au moins on l’avait échappé belle dans la classe, mais comme l’atsem devait nettoyer, il a bien fallu que la petite revienne. Elle a re-hurlé sur le banc, a refait des petits lapins pendant que je chantais « petit escargot porte sur son dos sa maisonnette » à la guitare.
Autant dire que Troizio n’est pas prête à revenir dans mes bras. Ca doit être psychologique, mais j’ai toujours l’impression qu’il y a une odeur de vomi qui traîne derrière elle, une semaine après. Ca doit être son doudou… Bref.


Enfin voilà, je pourrais vous parler des heures de mon nouveau job, parce que même si à 16h30, je suis vidée, rincée, essorée, bon, ben, je m’éclate malgré tout… J’crois que j’m'embêterais, si j’étais comme vous à bosser derrière un ordinateur. Bon et puis, franchement, travailler le mercredi quoi, désolée, mais ce serait pas possible…



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

V'z'avez quelque chose à dire?